Saisie conservatoire : conditions et procédure à suivre

Rédigé par Roxane Hidoux

La saisie-conservatoire est une procédure de recouvrement qui permet à un créancier d'immobiliser les biens du débiteur.

Sommaire :

En quoi consiste une saisie-conservatoire ?

La saisie conservatoire a pour objectif d’empêcher un débiteur qui n'a pas réglé sa créance d’organiser son insolvabilité.

Elle permet au créancier d'immobilier les biens du débiteur et de bloquer son compte bancaire, sans attendre une décision de justice qui peut prendre du temps et être interrompue par une procédure collective ou une procédure de surendettement personnel.

La procédure de saisie-conservatoire ne consiste pas pour le commissaire de justice à "saisir" les biens du débiteur mais à établir un simple inventaire de ses biens meubles (voiture, équipement...) et de ses créances (loyers, salaire...).

L'inventaire va servir de garantie au créancier et va permettre de rendre tous les biens du débiteur indisponibles, c'est-à-dire qu'ils ne pourront ni être vendus, ni déplacés, même s'ils sont détenus par une tierce personne.

La saisie conservatoire n'est qu'une mesure provisoire permettant à un créancier de se prémunir contre l'insolvabilité de son débiteur.

C'est pourquoi, celui-ci a la possibilité de demander sa mainlevée, c'est-à-dire sa suppression, s'il l'estime invalide, abusive ou qu'il accepte de consigner une somme permettant de payer le créancier.

A quelles conditions peut-on engager une saisie conservatoire ?

Pour pouvoir engager une saisie conservatoire, le créancier doit être en mesure de justifier de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de sa facture.

Exemples :

  • le débiteur cherche à vendre ses biens pour empêcher le règlement de la facture,
  • le débiteur risque un dépôt de bilan imminent.

Le créancier doit rapporter la preuve de l’imminence de cette insolvabilité par la production :

  • des comptes annuels de l’entreprise faisant état d’un déficit important, ou justement l’absence de publication desdits comptes ;
  • d’un état des privilèges et des nantissements faisant apparaître l’inscription de privilèges du Trésor Public ou de la sécurité sociale (impôts ou cotisations sociales d’une entreprise impayés) ;
  • d’une lettre de mise en demeure envoyée par courrier recommandé et restée sans réponse ;
  • d’une preuve de l’absence de règlement par le débiteur d’une dette ancienne non contestée ;
  • d’une preuve de l’insolvabilité du débiteur (déclenchement d’une procédure de surendettement personnel, pour un particulier, ou d’une procédure collective type redressement ou liquidation judiciaire, pour un professionnel).

Comment se déroule une procédure de saisie conservatoire ?

1ère étape : Obtenir un titre exécutoire

Un créancier qui ne dispose d'aucun titre exécutoire doit commencer par saisir le Juge de l'Exécution d'une demande de saisie conservatoire, au moyen d’une requête.

La requête doit être motivée, préciser le montant de la dette et la nature des biens sur lesquels doit porter la saisie conservatoire.

En pratique, le créancier doit envoyer sa requête ainsi que les pièces justificatives au Juge de l'Exécution du domicile de son débiteur.

De nombreuses juridictions instituent des procédures sans audience aux fins d’autoriser les saisies conservatoires en quelques jours.

Si le juge accepte la demande du créancier, celle-ci dispose de 3 mois pour faire exécuter la saisie conservatoire, en contactant un commissaire de justice. Passé ce délai, la décision n'est plus valable.

Et si le créancier dispose déjà d'un titre exécutoire ?

Un titre exécutoire est un acte juridique qui permet de faire pratiquer une saisie afin d'obtenir le recouvrement d'une facture impayée.

Un créancier dispose d'un titre exécutoire lorsqu'il possède :

  • une lettre de change acceptée,
  • un billet à ordre,
  • un chèque sans provision,
  • un bail d’habitation rédigé par un notaire,
  • une décision de justice en sa faveur mais n'ayant pas encore reçu force exécutoire, par exemple une ordonnance d'injonction de payer (le délai de recours dont dispose le débiteur n'a pas encore expiré ou celui-ci a fait appel de la décision).

Un créancier qui dispose d'un titre exécutoire peut solliciter directement un commissaire de justice en vue de faire pratiquer une saisie conservatoire sur les revenus ou les biens du débiteur, sans passer par le juge.

2ème étape : Faire procéder à la saisie conservatoire

Une fois que le juge a rendu sa décision, il la fait parvenir par courrier au créancier.

Celle-ci doit alors la remettre à le commissaire de justice, qui va procéder à la saisie conservatoire proprement dite.

En pratique, l’commissaire de justice ne va pas repartir avec les biens du débiteur défaillant ou se servir sur son compte bancaire mais se contenter d’établir un inventaire de ce qu'il possède.

La saisie conservatoire peut porter sur tous les biens meubles corporels (voitures, chaises, livres...) ou incorporels (argent, parts sociales, droits de propriété industrielle et commerciale...) appartenant au débiteur, à l’exception des biens nécessaires à la vie courante ou à l’activité professionnelle.

La saisie conservatoire peut porter sur des biens détenus par le débiteur ou placés entre les mains de tiers : les clients du débiteur (lorsque celui-ci est également une entreprise), sa banque... Il existe cependant des biens insaisissables.

Ses biens sont alors immobilisés : il ne peut plus déménager ses meubles, se servir de son véhicule ou même retirer de l’argent sur ses comptes bancaires.

Le débiteur a la possibilité de contester la saisie conservatoire.

3ème étape : Obtenir un titre exécutoire

La saisie conservatoire ne rend pas le créancier propriétaire des biens ou des sommes saisis par le biais d'une saisie conservatoire.

Ainsi, s'il ne dispose pas d'un titre exécutoire, le créancier dispose ainsi de 1 mois pour saisir un tribunal afin d’obtenir une décision de justice lui permettant de convertir la saisie conservatoire en saisie-vente ou en saisie attribution. Passé ce délai, la décision n'est plus valable.

Le créancier a le choix entre 3 procédures :

4ème étape : Demander la conversion de la saisie conservatoire

Si le débiteur refuse toujours de payer sa facture, le créancier peut engager la conversion de la saisie conservatoire en saisie-vente ou en saisie-attribution.

Pour cela, le créancier doit s'adresser à le commissaire de justice pour qu'il dresse un acte de conversion. Cet acte comprend :

  • la référence au procès-verbal de saisie conservatoire,
  • la mention du titre exécutoire qui a constaté formellement l'impayé,
  • le décompte des sommes à payer (en principal, frais et intérêts échus) et l'indication du taux des intérêts,
  • un commandement de payer cette somme dans un délai de 8 jours, faute de quoi il sera procédé à la vente des biens saisis.

L'commissaire de justice va remettre l’acte de conversion au débiteur et, à défaut de paiement dans les 8 jours, il aura 1 mois pour vendre lui-même les biens saisis et payer le créancier.

À défaut de cette vente amiable, il est procédé à la vente forcée des biens saisis (vente aux enchères publiques). Le produit de la vente sera ensuite reversé au créancier.

Il n'existe pas de durée à respecter pour engager la conversion d'une saisie conservatoire en saisie-vente ou en saisie-attribution.