Mise en demeure de payer : conditions de validité, mentions obligatoires et effets

Mis à jour le 7 avril 2025
Rédigé par Roxane Hidoux

Une lettre de mise en demeure de payer n'est valable que lorsqu'elle prend une forme déterminée et contient certaines mentions obligatoires.

Qu'est-ce qu'une mise en demeure de payer ?

Une lettre de mise en demeure de payer est un courrier envoyé par un créancier à son débiteur par lettre simple, par lettre recommandée ou transmise par un commissaire de justice. C'est une étape indispensable pour engager une procédure de recouvrement judiciaire en cas d'impayé.

Pour produire des effets juridiques, la lettre de mise en demeure de payer doit permettre une « interpellation suffisante » du débiteur (article 1344 du Code civil).

Une lettre de mise en demeure de payer peut être envoyée par :

  • le service contentieux de l'entreprise, chargé de recouvrer les factures impayées ;
  • une société de recouvrement de créances mandatée par le créancier. La mise en demeure doit alors contenir certaines mentions obligatoires ;
  • un commissaire de justice qui présentera au débiteur une « sommation de payer » valant mise en demeure. Malgré le statut de son auteur, la lettre de mise en demeure n'a pas plus de valeur que si elle avait été envoyée par le créancier directement ou par une société de recouvrement ; elle ne permet pas donc pas de procéder à une saisie.

La dette doit obligatoirement posséder ces 3 caractéristiques pour être recouvrée :

  • elle doit être certaine : son existence peut être prouvée par la remise de documents tels qu’une facture ou par un bon de commande ;
  • elle doit être liquide : le prix doit être exact et fixé au préalable (pas d'estimation). Les frais de recouvrement étant à la charge du créancier, l'agence de recouvrement ou le commissaire de justice ne peut facturer aucun frais supplémentaire (alinéa 3 de l'article 32 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991) ;
  • elle doit être exigible : la date limite de paiement figurant sur la facture a été atteinte (et la facture n'est pas prescrite).

Faut-il envoyer une relance avant de pouvoir mettre le client en demeure de payer ?

Non, c'est au choix du créancier. En fonction de la gravité de la cause du retard, il peut choisir de mettre en demeure soit dès l'échéance, soit après des relances.

Les effets juridiques produits par la lettre de mise en demeure resteront les mêmes. Et rien n'empêche le créancier de continuer à négocier avec son débiteur en lui accordant des remises de dette, des délais de paiement...

Quelles mentions obligatoires doit comporter une lettre de mise en demeure de payer ?

Afin de constituer une "interpellation suffisante", la lettre de mise en demeure doit mentionner :

  • le terme « mise en demeure », dans son en-tête,
  • la date de sa rédaction,
  • les coordonnées du créancier ainsi que ceux de son débiteur (la mention du numéro d’immatriculation, de la forme juridique et du capital social de l'entreprise n’est en revanche pas obligatoire),
  • la nature de l’impayé (montant, n° de facture…),
  • le dernier délai laissé au client pour payer sa facture,
  • les conséquences en cas de non-paiement : le plus souvent, le créancier précise qu’à défaut d’exécution de la part du client, une procédure judiciaire sera lancée, susceptible de mettre des mesures beaucoup plus contraignantes à l’égard de ce dernier.

La mise en demeure envoyée par le créancier ou par un commissaire de justice

De façon générale, la mise en demeure de payer, qu'elle soit émise par le créancier lui-même ou par un commissaire de justice, doit :

  • comporter la date de sa rédaction, les coordonnées du destinataire ;
  • résumer le problème ;
  • demander un règlement ;
  • fixer un délai pour la résolution du problème ;
  • mentionner les coordonnées de l'expéditeur et sa signature ;
  • inclure dans son texte l'expression « mise en demeure ».

Une lettre de mise en demeure est valable même si le créancier n'y mentionne pas son numéro d'immatriculation, sa forme juridique ou son capital social.

La mise en demeure envoyée par une agence de recouvrement

Lorsque la mise en demeure de payer est envoyée par une agence de recouvrement, elle doit obligatoirement comporter les mentions suivantes :

  • le nom ou la dénomination sociale de la personne chargée du recouvrement amiable, son adresse ou son siège social ainsi que l'indication qu'elle exerce une activité de recouvrement amiable ;
  • le nom ou la dénomination sociale du créancier, son adresse ou son siège social ;
  • le fondement et le montant de la somme due, détaillant le principal, les intérêts et les accessoires, et distinguant les différents éléments de la dette (à l'exclusion des frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire, qui restent à la charge du créancier) ;
  • l'indication d'avoir à payer la somme due et les modalités de paiement de la dette (délais, lieu...) ;
  • la reproduction des alinéas 3 et 4 de l'article 32 de la loi du 9 juillet 1991 « Sauf s'ils concernent un acte dont l'accomplissement est prescrit par la loi, les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier. Toute stipulation contraire est réputée non écrite. Cependant, le créancier qui justifie du caractère nécessaire des démarches entreprises pour recouvrer sa créance peut demander au juge de l'exécution de laisser tout ou partie des frais ainsi exposés à la charge du débiteur de mauvaise foi. »

Le non-respect de ces obligations est sanctionné d'une contravention de cinquième classe, c'est-à-dire d'une amende pouvant aller jusqu'à 1 500 €.

Modèle de lettre de mise en demeure de payer

Nom / Dénomination du client
Adresse du client


Objet : mise en demeure de payer
Lettre recommandée avec accusé de réception.


Madame, Monsieur,


Nous constatons avec regret qu'en dépit de nos courriers de relance des ...(préciser éventuellement les dates de ces courriers), votre société n'a toujours pas procédé au règlement de notre facture n°..., échue le ...

En conséquence, nous vous mettons en demeure de nous régler la somme de ... €, dans un délai de 8 jours à réception de la présente.

A défaut, notre service contentieux se chargera d'en obtenir le recouvrement par voie de justice.

Nous vous rappelons que le présent courrier fait courir les intérêts légaux et conventionnels.

Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées.


Signature

Quels sont les effets juridiques d'une mise en demeure de payer ?

Une mise en demeure de payer a pour objet de constater officiellement l'inexécution par le débiteur de son obligation de payer la facture.

Contrairement à une lettre de relance, une lettre de mise en demeure de payer a des conséquences juridiques :

  • elle marque le point de départ des intérêts de retard ;
  • elle peut rendre exigible immédiatement la totalité des sommes restant dues (dans le cadre d'un prêt, par exemple) ;
  • elle permet de réclamer des dommages et intérêts pour le retard subi ;
  • elle permet au créancier de suspendre ses propres obligations. Ainsi, le créancier qui n'a pas encore livré un bien ou un service, parce qu'il attend d'être payé, n'est pas tenu de le livrer, une fois qu'il a mis en demeure le débiteur de payer. Cet effet est particulièrement utile lorsque le débiteur demande d'être livré avant de payer, alors qu'il n'a aucune intention ou pas les moyens de payer.

En revanche, l'envoi d'une mise en demeure n'a pas pour effet d'interrompre le délai de prescription d'une facture.

Une mise en demeure de payer peut-elle permettre de pratiquer une saisie ?

Il arrive souvent que les sociétés de recouvrement ou les commissaire de justices de justice utilisent dans les lettres de mise en demeure de payer des termes juridiques ou menaçants, comme par exemple " sommation extrajudiciaire " ou " mise en demeure avant poursuites ", " saisie de rémunération ", " saisie immobilière ", " saisie du véhicule ", " issue désagréable ", en caractère gras et de grande taille.

Certaines lettres de mise en demeure peuvent aller plus loin et donner l'apparence d'actes juridiques à leurs courriers en utilisant les termes " injonction de payer " non déposées au tribunal ou " avis d'assignation ".

D'autres prévoient des délais de paiement très courts (par exemple, 48h) qui ont uniquement pour but de faire paniquer le débiteur et de l'empêcher de se renseigner sur la réalité ou le montant de la dette ou sur la validité de la démarche employée.

Pourtant, les cabinets de recouvrement ou les commissaire de justices de justice sont de simples mandataires du créancier et ne peuvent pas prétendre saisir des biens à ce stade. Ils doivent pour cela disposer d'un titre exécutoire, c'est-à-dire d'une décision de justice (par exemple, une ordonnance d'injonction de payer) ou d'un acte notarié.

Comment envoyer une mise en demeure de payer ?

Une mise en demeure peut être transmise :

  • par lettre simple ;
  • par lettre recommandée avec accusé de réception ;
  • par email. La difficulté pour le créancier est de justifier la réception du document, l'envoi par simple email (même en cochant la case « accusé de réception ») ne garantissant pas sa destination. Sans la preuve de l‘envoi d'une mise en demeure, il ne pourra pas engager de procédure judiciaire. Il est préférable d'opter pour l'envoi d'une lettre recommandée électronique avec accusée de réception. Ce service est par exemple proposé sur le site Internet de La Poste ;
  • par citation en justice.

La mise en demeure que le créancier doit adresser au débiteur en application de l’article 1231 du Code civil n’étant pas de nature contentieuse, le défaut de réception effective par le débiteur de la mise en demeure, adressée par lettre recommandée, n'affecte pas sa validité (Cass. 1e civ. 20-1-2021 n° 19-20.680).

Quels sont les recours du client face à une mise en demeure de payer ?

La facture mentionnée dans la mise en demeure de payer n'est pas due

La facture correspond à une offre non souscrite ou qui a été résiliée

Il peut arriver que le débiteur ait signé une autorisation de prélèvement à son créancier mais qu'entre-temps il ait demandé la résiliation de son abonnement. Malgré cela, le créancier continue à débiter son compte.

Cette situation vise notamment les fournisseurs d'accès Internet. Après avoir pris acte de la résiliation ou après avoir refusé de le faire, ils continuent à prélever des mensualitésjusqu'à ce que l'abonné demande à sa banque de stopper le prélèvement automatique. Une société de recouvrement ou un commissaire de justice est alors mandaté par le fournisseur d'accès.

Dans cette situation, il faut faire opposition au prélèvement effectué : la banque sera alors tenue de recréditer le compte bancaire du débiteur.

La facture mentionnée est inexistante ou a déjà été payée

Il faut informer l'agence de recouvrement ou le commissaire de justice de la contestation de la facture sur le fond et que le débiteur régler ce différend directement avec le créancier.

Il faut ensuite contacter ce dernier et lui envoyer une lettre dans laquelle le débiteur lui explique son désaccord.

Ces démarches doivent être faites par LRAR.

La facture est prescrite

Toute facture se prescrit au-delà d'un certain délai. Passé ce délai, le créancier ne peut plus réclamer le paiement de la somme d'argent : plus aucun recours n'est possible. Mais s'il parvient, après ce délai à obtenir un paiement, celui-ci reste valable.

En principe, le délai de prescription d'une facture est de :

  • 2 ans pour les factures adressées à un particulier,
  • 5 ans pour les factures adressées à un autre professionnel.

Des délais de prescription spécifiques ont cependant été mis en place pour certaines prestations :

  • 10 ans pour les factures relatives aux charges de copropriété,
  • 5 ans pour les factures relatives aux loyers et charges locatives – hors HLM (uniquement lorsque le locataire est un particulier),
  • 1 an pour les factures relatives au téléphone et internet.

Attention, certains actes du débiteur font repartir un nouveau délai de prescription, c'est-à-dire que le créancier peut à nouveau poursuivre le débiteur pour l'intégralité de la somme due :

  • paiement partiel de la facture ;
  • demande de délais de paiement supplémentaires au créancier ;
  • signature d'une reconnaissance de dette. Attention, les sociétés de recouvrement peuvent inclure des formules s'analysant juridiquement en des reconnaissances de dette et demandant une simple signature du débiteur.

La facture mentionnée dans la mise en demeure de payer est due

Lorsque la dette évoquée dans la mise en demeure de payer est bien certaine, liquide et exigible et que le débiteur est en mesure de régler sa facture, il doit envoyer son règlement directement au créancier par lettre recommandée avec accusé de réception et en adresser une copie à la société de recouvrement ou au commissaire de justice.

Lorsque le débiteur ne peut pas payer en une seule fois, il faut demander directement au créancier un étalement de la dette et formaliser son accord par écrit.

Il est possible de ne pas réagir à une lettre de mise en demeure de payer mais cela porte toutefois à conséquences et risque de pousser le créancier à entamer une procédure d'injonction de payer.

Mais, tant que le créancier ne dispose pas de titre exécutoire, il ne peut pas procéder à une saisie, quel qu’il soit (commissaire de justice, cabinet de recouvrement, créancier...).